3 Questions à Bruno DESFORGES, Responsable achats IT du GROUPE LA POSTE

Quelle est votre vision du futur du travail et de l’accès à l’expertise ?

A mon avis, l’espace de bureau va être profondément modifié. Les expertises sont dans le monde entier et elles ne vont pas toutes se déplacer chez nous, donc il faut justement s’ouvrir et utiliser les outils technologiques pour pouvoir collaborer avec ces experts. On pourra travailler de n’importe où, tout en gardant certains espaces collaboratifs d’échanges entre les équipes.

Nos Villages La Poste sont par exemple des lieux qui favorisent l’animation et l’interaction. Ce changement de localisation du travail peut aussi avoir un effet positif de repeuplement de certaines régions délaissées de France.

Pour ce qui est de la formation, si on veut que tout le monde devienne un expert du numérique, on va créer beaucoup d’échecs. La solution n’est pas d’apprendre à tout le monde à maitriser le code et la programmation. Ces métiers demandent une capacité d’abstraction pour créer des algorithmes, pour faire fonctionner un SI. Ce n’est pas parce qu’on apprend à conduire qu’on sait comment fonctionne le véhicule, on n’est pas tous garagistes ! De la même manière, il faut des informaticiens qui n’ont pas peur de mettre les mains dans le cambouis.

Donc développer les compétences certes, mais aussi la créativité, la curiosité, pour pouvoir vraiment apporter quelque chose à un projet. Ce sont ces qualités humaines qui feront la différence face à l’Intelligence Artificielle de demain !

Êtes-vous victime de la pénurie d’expertises en numérique chez La Poste ?

Oui, comme toutes les entreprises, nous sommes face à une pénurie de talents dans les métiers du numérique. C’est d’ailleurs la seule branche de métiers où nous faisons appel à des ressources externes à l’entreprise, en particulier dans la partie production informatique. Nous avons surtout des difficultés à recruter des experts en data et des développeurs.

Pour combler ce manque, nous faisons de plus en plus appel aux freelances par l’intermédiaire de « porteurs » qui sont souvent intégrés dans nos locaux quelques jours par semaine. Ils peuvent également travailler de chez eux, le télétravail chez nous étant bien développé dans les métiers du numérique. Les équipes métiers sont aussi déjà habituées à travailler avec des consultants externes, qu’ils soient freelances ou en ESN.

L’achat de compétences freelance représente actuellement entre 1 et 3% de la dépense annuelle de la maitrise d’oeuvre. Le marché est en pleine évolution et nous pensons qu’il est possible d’atteindre les 10% d’achats de prestation intellectuelle en freelance dans les années à venir.

Pour cela, nous venons de lancer un appel d’offres pour référencer des plateformes d’intermédiation d’entreprises unipersonnelles (cible freelance) et ainsi optimiser les demandes d’expertises auprès du secteur d’activité. Notre maitrise d’oeuvre sera composée à 80% de centres de services et de centres de compétences, complétée par 20% de prestation de service de haut niveau via des freelances ou consultants en entreprises « standard » avec des expertises rares.

En interne, qu’est-ce que vous mettez en place pour retenir vos talents ?

Nous avons peu de turnover en interne car nous avons un bon mix entre la stabilité que représente le fait de travailler pour un groupe comme La Poste et l’évolution de carrière professionnelle que nous proposons en interne.

On change souvent de poste à La Poste ! Les évolutions de carrière aussi bien fonctionnelles que hiérarchiques sont fréquentes et nous prenons le soin de faire un bon transfert de compétences entre les collaborateurs.